Grenoble: appel à la grève

Publié le par Collectif Psychologues Descartes

Chers collègues,

Le calendrier des réformes actuelles (décret sur la réforme des statuts, mastérisation, CNRS) ne permettra pas de véritables négociations sur le fond : malgré les quelques concessions que nous pourrons obtenir à la marge concernant nos futurs statuts (cf. amendements du CTPU du 24/11), malgré les aménagements que nous aurons bricolés à la va-vite dans nos maquettes pour y faire rentrer de force la préparation aux concours d'enseignement (mais quels concours ?), le fond de ces réformes ne variera pas, car elles servent simplement d'"habillage aux suppressions de postes" (pour paraphraser Xavier DARCOS, octobre 2008, source : Le canard enchaîné) et aux réductions budgétaires. La modulation des services qui nous est proposée n'a pas d'autres buts :
- les responsabilités administratives et pédagogiques pour lesquelles certains d'entre nous touchent encore des décharges pourront être considérées comme des "heures consacrées (...) aux tâches d’intérêt collectif correspondant à la mission d’enseignement" (article 4 du projet de décret). Ces décharges seront les premières à être supprimées lorsque les contraintes budgétaires nous y amèneront.
- conséquence de la politique budgétaire du ministère, les ouvertures de postes seront extrêmement limitées, chargeant les services des personnes en place tout en fermant les portes des universités aux jeunes docteurs. Leur titularisation s’effectue de plus en plus tard, sous prétexte de manque d’expérience les obligeant à cumuler les contrats précaires. Cette réforme va renforcer l’incertitude de trouver un emploi en sortie de thèse.
- nos services eux-mêmes deviendront des variables d'ajustement budgétaire : même si on s'oppose localement aux modulations individuelles et discrétionnaires, lorsque notre université autonome sera au bord de la faillite, suite au désengagement progressif de l'état, nous serons condamnés à décider nous-mêmes, collectivement, l'augmentation globale de nos services : pourquoi pas 230 h ? 250 h ? 300 h ?? Nous vous rappelons que la LRU prévoit que nos salaires soient payés directement par l'université (et non plus par la Trésorerie Générale).
- corollaire de la modulation : la recherche non finalisée deviendra un LUXE RARE : en effet, le décret INTERDIT A UNE UNIVERSITÉ DE DIMINUER GLOBALEMENT LE POTENTIEL D'ENSEIGNEMENT DE SES EMPLOIS STATUTAIRES, MAIS PAS SON POTENTIEL RECHERCHE. Il ne s'agit pas simplement de "déshabiller Pierre pour habiller Paul", en déchargeant les super-chercheurs pour surcharger les infra-enseignants, avec l'équation : "enseignement = punition". Dans une université qui surchargera l'ensemble de ses enseignants, ceux qui travaillent avec l'industrie et ramènent des contrats seront peut-être épargnés. Il ne suffira pas d'être "publiant" (et peu d'entre-nous réussiront à se conformer aux critères de l'AERES): il faudra en outre être "rentable". Dans la future université de Grenoble, quelle sera la place des lettres et langues ? Du point de vue de l'ensemble de la recherche, tout ceci est cohérent avec la politique actuelle de l'ANR et le démantèlement programmé du CNRS. En effet, le CNRS sera découpé en instituts, dotés de directeurs nommés par le ministre, mettant en cause l’indépendance de la recherche vis-à-vis des pouvoirs en place. Si cette réforme entérine l’affaiblissement de la recherche fondamentale, elle met également en péril l’interdisciplinarité valorisée et rendue possible par le CNRS.
- quant aux petites filières, le morcellement de la formation en plusieurs parcours conduira mécaniquement à la diminution des effectifs, avec le risque d'une fermeture de ces parcours. Nous serons alors amenés, comme le préconisent les textes, à compléter notre service ailleurs dans l'académie : « Dans le cas où il apparaît impossible d’attribuer le service de référence à ces personnels, le président ou le directeur de l’établissement leur demande de compléter leur service dans un autre établissement public d’enseignement supérieur de la même académie sans paiement d’heures complémentaires ». (article 4-II du projet de décret).
... et tout ceci s'intègre dans l'ensemble des réformes qui visent au dégraissage progressif du service public d'enseignement, de la maternelle à l'université. A tous les âges, l'état s'est lancé dans une politique de "déremboursement" : on réduit les heures, on rend certaines matières optionnelles, et on ouvre un grand marché aux "complémentaires" de l'enseignement : un conseil, investissez dès aujourd'hui dans Acadomia !!! La libéralisation de l'éducation est inscrite dans l'AGCS depuis de nombreuses années.
Il en est pour preuve que la formation et le statut des futurs enseignants sont eux aussi gravement mis en péril par les maquettes des nouveaux concours de recrutement telles que le Ministère les a imposées, sans même que les universitaires, principaux acteurs de la formation initiale, n’aient été consultés et correctement informés : menace pesant sur le caractère national des concours, dissociation formation / recrutement (« Passer dans les concours de recrutement de professeurs d’une logique de revalidation du niveau universitaire à une logique de recrutement conforme aux besoins de l’employeur », Lettre de cadrage du Ministère - octobre 2008), réduction à la portion congrue des matières disciplinaires à l’écrit et disparition pure et simple de ces mêmes matières à l’oral, alignement scandaleux des programmes des concours sur le seul contenu des manuels scolaires, suppression de l’année de stage rémunéré qui conduit à mettre directement devant une classe de jeunes enseignants débutants sans aucune formation pratique, perte d’une année d’ancienneté pour les nouveaux enseignants dans un contexte d’allongement progressif et permanent de la durée des études et du travail.

Aveu explicite de transformer l’université du savoir et de la connaissance en une université marchande et rentable :
 
" Vous avez le droit de faire littérature ancienne, mais le contribuable n’a pas forcément à payer vos études de littérature ancienne si au bout il y a 1000 étudiants pour deux places. Les universités auront davantage d’argent pour créer des filières dans l’informatique, dans les mathématiques, dans les sciences économiques. Le plaisir de la connaissance est formidable mais l’Etat doit se préoccuper d’abord de la réussite professionnelle des jeunes. " (Nicolas Sarkozy, Journal gratuit 20 minutes du 16 avril 2007)

Il y a donc deux formes de connaissance : celle pour le plaisir et celle qui sert à quelque chose... Si vous hésitez entre ces deux catégories, Nicolas Sarkozy a déjà tranché pour vous !

CONTRE CES RÉFORMES, IL FAUT OPPOSER UN FRONT DU REFUS ! ARRETONS LES SIMULACRES DE NÉGOCIATIONS POUR CRÉER UN VÉRITABLE RAPPORT DE FORCE !

Comment ?


Nous avons un moyen simple, qui nous permet de continuer de se rencontrer, entre étudiants et personnel, pour s'informer, débattre, et construire un véritable mouvement d'opposition collective et de propositions alternatives : LA GRÈVE ADMINISTRATIVE. Cela peut se traduire par différents types d'action :

- Au niveau des enseignants : refus de participer aux jurys et retenu des notes.

- Pour ceux qui ont des responsabilités administratives et pédagogiques : démission symbolique de leur fonction, si le décret n'a pas été retiré au premier janvier 2009.

- Au niveau de l'établissement : refus de remettre les nouvelles maquettes de masters de formation des enseignants au ministère.

Bien sûr, un tel mouvement ne peut avoir d'effet que si nous sommes nombreux à y participer : ce genre de désobéissance civile ne peut se faire à  2, à 5 ou à 10. Que ceux qui sont favorables à une telle action répondent "chiche !" à ce mail, ou prennent contact avec nous pour signer un engagement par écrit. Si nous sommes nombreux, nous avons vraiment une chance de peser dans de futures négociations, et de gagner.

Premiers signataires :

Marc AVEZOU, PRAG, UFR de Langues
Catherine BLANCHET, Secrétariat pédagogique de la licence Sciences du langage.
Leonardo CASALINO, Maître de conférences, UFR de Langues
Anne CAYUELA, Professeur des Universités, UFR de Langues
Isabelle COGITORE, Professeur des Universités, UFR Lettres et Arts
Yves CITTON, Professeur des Universités, UFR de Lettres et Arts
Laurence COMPARAT, Ingénieur d'étude, Responsable du Pôle Usage de la DSI
Emmanuelle EGGERS, PRAG, UFR de Langues
Lisa EL GHAOUI, Maître de conférences, UFR Langues
 Ivanne GALANT, Monitrice allocataire, UFR de Langues
François GENTON, Professeur des Universités, UFR de Langues,
Lucia GOMEZ, lectrice, UFR de Langues
Véronique JUDE, Maître de conférences, UFR de Langues
Odile LAGACHERIE, Maître de conférences, UFR Lettres et Arts
Patrick MULA, Maître de conférences, UFR de Langues
Christine NOILLE-CLAUZADE, Professeur des Universités, UFR Lettres et Arts
Françoise PAPA, Maître de conférences, UFR des sciences de la communication
Claude PONTON, Maître de conférences, Département d'informatique pédagogique
Daniela RECHENMANN, Professeur des Universités, UFR de Langues
Laurent SCOTTO d'ARDINO, Maître de conférences, UFR de Langues
Virginie ZAMPA, Maître de conférences, Département d'informatique pédagogique
 

Collectif ¡ M.A.R.R.E ! - Mobilisés pour une Autre Réforme de la Recherche et de l'Enseignement
 
Aurélie DENY, ATER, UFR de langues
Auriane FAURE, Monitrice allocataire, Département d'informatique pédagogique
Franck GAUDICHAUD, Maître de conférences, UFR de langues
Pierre GEAL, Maître de conférences, UFR de langues
Olivier KRAIF, Maître de conférences, Département d'informatique pédagogique
 Cécile TERREAUX-SCOTTO, Maître de conférences, UFR de langues


Publié dans Nous informer

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